L’équilibre énergétique (combien manger)
L’organisme est en équilibre du point de vue énergétique si la nourriture fournit autant de calories que le corps en dépense.
Si on mange plus qu’on ne dépense, on stocke l’excédent sous forme de graisse, et ce quelle que soit la nature des aliments consommés en excès (lipides, glucides ou protéines).
La façon la plus précise d’ajuster son apport en énergie (calories) aux besoins du corps est d’écouter les messages de son organisme : la faim nous signale la nécessité de manger, le rassasiement nous dit d’arrêter.
Les bébés se régulent ainsi dès la naissance, mais nous sommes capables de continuer à gérer notre apport en énergie de cette façon toute la vie. C’est cette régulation qui permet à certaines personnes d’avoir un poids stable ou qui varie très peu, sans surveiller leurs apports alimentaires. Cependant, pour beaucoup, de nombreux facteurs rendent difficile cette régulation naturelle.
L’organisme fait connaître par un signal de faim son besoin de recevoir de l’énergie pour remplacer celle qu’il a dépensée. Si vous avez besoin de 700 kcal, 200 ne suffiront pas à vous rassasier et 1500 vous donneront une sensation de lourdeur.
Ceci reste vrai quel que soit l’aliment qui apporte ces calories. Si vous mangez des aliments denses en calories (du chocolat par exemple), il en faut un petit volume pour vous rassasier. Si ce sont des aliments peu denses (des crudités par exemple) il vous faudra de grands volumes d’aliments.
Dans le cas des aliments denses en calories, vous n’avez pas la distension de l’estomac pour vous arrêter avant d’avoir dépassé le nombre de calories nécessaire. Avec les aliments peu denses en calories, on ressent à l’inverse une distension douloureuse de l’estomac avant d’avoir atteint le nombre de calories nécessaires. Cela signifie en fait que ces aliments ne sont pas adéquats pour apporter l’énergie dont le corps a besoin. Les légumes à l’eau, par exemple, apportent des vitamines, des minéraux, des fibres, mais il est très difficile de fournir à son corps suffisamment d’énergie uniquement avec ce type d’aliments.
Les aliments denses en calories demandent donc un peu plus d’attention pour ne pas en manger trop, car le signal de rassasiement sans distension désagréable de l’estomac est de nature moins violente, et donc un peu plus difficile à percevoir. C’est là que le goût et la dégustation attentive sont des outils très efficaces.
Comme vous l’avez probablement remarqué, les bouchées qu’on mange quand on a faim procurent bien plus de plaisir gustatif que celles consommées sans faim. Déguster avec attention permet de remarquer que le plaisir gustatif diminue au fur et à mesure de la consommation. En arrêtant au bon moment, on évite à la fois l’inconfort après le repas et le risque de stocker longtemps sous forme de graisse les calories consommées en excès.
Beaucoup de personnes ne remarquent pas cette diminution du plaisir en mangeant. Elles apprécient l’idée de manger tel aliment qui leur plaît, mais ne dégustent pas l’aliment réel qu’elles mettent dans la bouche. On peut dire qu’elles mangent des idées d’aliments, plus que des aliments réels ! En mangeant de cette façon, le plaisir ne varie pas car c’est un plaisir de l’imagination et non de la réalité des sens. Dans ce cas, on mange souvent trop car les idées ne rassasient pas.
Il s’agit donc de manger en étant attentif à l’évolution du plaisir gustatif. Le fait de remarquer et nommer les sensations que procure l’aliment permet de mieux s’y concentrer.
L’équilibre nutritionnel personnel (que manger)
On nous explique depuis quelques dizaines d’années ce qu’il faut "manger équilibré". Les aliments conseillés et ceux à éviter varient: il faut convenir que la science de la nutrition est encore toute jeune! Malgré cela, on nous conseille de ne pas nous fier à nos désirs alimentaires, nos appétences spontanées, et de faire confiance à des données épidémiologiques, statistiques.
Pourtant, des travaux scientifiques montrent que l’homme reçoit des signaux de son organisme, qui lui indiquent vers quel aliment se tourner pour couvrir ses besoins à un moment donné. On appelle appétits spécifiques ces envies d’aliments précis. Par exemple, si vous avez besoin de calcium et de protéines, vous serez davantage attiré par les fromages, le lait ou les laitages qui contiennent en effet du calcium et des protéines que par des fruits.
Le repas est perçu comme satisfaisant si et seulement si il couvre les besoins nutritionnels (et énergétiques). Même si vous mangez votre chocolat préféré, vous n’en serez pas satisfait si vous aviez envie d’un steak avec des légumes, et vice-versa.
Tant qu’on n’a pas senti cette satisfaction d’avoir couvert ses besoins nutritionnels, on a tendance à continuer à manger, et ce même si le nombre de calories nécessaire a été atteint ou dépassé.
Il est donc important d’être attentif à ses appétences, c'est-à-dire d’être conscient de l’adéquation de l’aliment que l’on mange à ses besoins.
Si ce n’est matériellement pas possible, on consommera le moins possible de ce qui est disponible et qui ne nous convient qu’à moitié, et on réservera sa faim pour le moment où on trouvera un aliment plus adéquat.
Pour avoir conscience de ses besoins, il est cependant nécessaire de ne pas penser de mal de ce dont on aurait envie et besoin de manger, et de ne pas avoir peur de ne plus pouvoir manger d’un aliment qui fait moins envie sur le moment, si on ne profite pas de l’occasion tout de suite. En somme, la restriction cognitive empêche qu’on perçoive correctement ses appétences spécifiques.
L’équilibre émotionnel (comment manger)
Depuis la nuit des temps c’est surtout le PLAISIR qui incite l’homme à manger et qui est l’objectif principal du repas: le plaisir de calmer des sensations désagréables de faim, d’apprécier les sensations agréables, goûts, arômes et textures, qui rappellent parfois des moments agréables ou réconfortants de son histoire personnelle. C’est le plaisir aussi de partager des aliments avec d’autres pour nouer ou entretenir des liens forts avec eux.
Lors du repas, on nourrit à la fois le corps et l’esprit, les sens et les émotions. Le plaisir alimentaire intervient de façon importante dans l’équilibre émotionnel.
L’équilibre émotionnel, qui plus est, semble bien être prioritaire: l’organisme est prêt à sacrifier les équilibres énergétiques et nutritionnels pour le sauvegarder.
Si l’aliment n’est pas satisfaisant d’un point de vue gustatif, ou s’il provoque des émotions négatives (culpabilité de manger un aliment «interdit», peur de grossir, colère de ne pas manger autre chose, tristesse du temps passé...), on a tendance à en manger davantage, ou à manger ensuite un aliment plus agréable en bouche même si on n’a plus faim.
C’est un peu comme si on devait atteindre une certaine somme de plaisir et que chaque bouchée participait plus ou moins à l’atteindre: plus il y a de plaisir par bouchée et moins il y a besoin de bouchées. Pour bien apprécier chaque bouchée à sa juste valeur, il s’agit à la fois d’être conscient du plaisir procuré par l’aliment et de s’accorder le droit de l’éprouver.
Comme pour les appétits spécifiques, il s’agit de se rendre compte le plus rapidement possible si l’aliment ne nous procure guère de plaisir. On peut alors décider de changer d’aliment, ou bien de manger peu et d’attendre de trouver mieux, ou encore manger quand même à satiété calorique. On se consolera alors par un repas suivant plus plaisant !