L’obésité est contagieuse
Lorsque l’on parle d’épidémie, ce qui est le cas pour l’obésité, cela correspond à l’étude de l’évolution dans le temps et l’espace de la maladie. Dans l’esprit du public, épidémie signifie transmission, sous-entendu, contagion. Voilà de quoi considérer un peu plus les obèses comme des pestiférés ou des lépreux des temps modernes.
Pourtant, l’on sait depuis longtemps que les personnes obèses s’assemblent parce qu’elles se ressemblent, ce qui est rassurant dans un groupe social. Mais l’on sait aussi que l’on peut s’assimiler par le comportement et que vivre avec des gros mangeurs peut susciter des comportements hyperphages. C’est la transmission des habitudes, l’hérédité de table. Des études peu charitables ont aussi montré que les animaux domestiques des personnes obèses pouvaient aussi le devenir.
Tout ceci peut aussi ressembler à un nouveau ghetto de « gros ». En effet, on sait que l’obésité est plus fréquente dans les milieux moins aisés. Ainsi, certains experts de santé publique estiment que l’implantation des fast-foods et des hypermarchés est responsable de l’obésité. La menace de rejeter les pauvres obèses est proche. Or, une étude américaine a montré récemment que la prévalence de l’obésité était inversement corrélée à la densité de fast-foods comme de restaurants classiques (1).
On ne peut cependant exclure toute transmission par contagion. Des études sérieuses montrent que l’obésité peut être déclenchée (pas due) par une infection virale, modifiant la perméabilité intestinale, induisant une inflammation bas-grade … On sait aussi qu’une mère obèse accouchant par voie basse transmet à son enfant un microbiote obésogène : curieusement cependant, ce risque augmente encore plus lorsqu’elle accouche par césarienne, alors qu’un enfant d’une mère mince qui accouche par césarienne a plus de risque de devenir obèse (car la mère ne lui a pas transmis son microbiote de femme mince) qu’un enfant né par voie basse d’une mère mince (2).
Enfin cette transmission « infectieuse » n’est peut-être pas à exclure totalement lorsque l’on se rappelle que les caries dentaires dont on pensait qu’elles étaient la seule conséquence de la consommation de sucre sont transmises par la flore bactérienne cariogène qu’une mère transmet à son enfant en suçant sa tétine !
Docteur Jean-Michel Lecerf
Chef du Service de Nutrition
Institut Pasteur de Lille
- MAZIDI M
Higher densities of fast-food and full-service restaurants are not associated with obesity prevalence.
Am J Clin Nutr 2017, 106, 603-13
- MUELLER NT
Does vaginal delivery mitigate or strengthen the intergenerational association of overweight and obesity? Findings from the Boston Birth Cohort
Int J Obes 2017, 41, 497-501